Le pouvoir du moment présent
Par Alexandra Palao |
3 avril 2022
"Aucun problème ne peut-être résolu à partir du même niveau de conscience qui l'a créé" - Albert Einstein
Manger en pleine conscience n'est pas une nouvelle injonction.
Comment enjoindre quelqu'un à être en pleine conscience s'il n'en cultive pas l'intention lui-même?
La pleine conscience nous remet aux commandes de notre vie, de nos choix et de notre relation à l'assiette, sous un mode non plus injonction et soumis, mais ACTEUR.
Rappelons la définition opérationnelle qu'en donne Jon Kabat-Zin :
"La pleine conscience est le fait de porter son attention délibérément, dans l'instant présent,
sans jugement, sans attente "
L'engagement qu'elle requière de la part de l'individu est clair. Au service de la relation à l'alimentation, le moment présent offre une autre perspective sur l'alimentation.
Un engagement qui me semble faire défaut dans les politiques institutionnelles et les recommandations du corps médical données jusqu'ici pour résoudre les problèmes de poids.
Libre-arbitre et autonomie
Depuis près de 60 ans, l'individu se base sur des règles édictées par d'autres que lui pour savoir quoi manger, quand et en quelle quantité. Régimes, repères nutritionnels, désormais Nutri-score et applications de type Yuka.
Peu à peu il s'est déconnecté de ses signaux internes (faim, rassasiement, satiété, inconfort émotionnel) et de sa sagesse intérieure.
Il a appliqué des règles.
A commencé à croire que ses problèmes de poids étaient dûs au fait qu'il ne respectait pas ces règles à la lettre, qu'il n'avait pas assez de volonté ou encore que le gras et le sucre étaient ses ennemis.
Peu à peu, il s'est engagé dans une guerre contre lui-même, contre ses en-vies.
L'instant présent est cet espace où il n'y a plus de passé, plus de futur à contrôler, anticiper, mais bien le seul espace où nous pouvons changer le futur.
L'espace où nous allons poser un acte, choisi, de tel ou tel aliment, de telle quantité, en accord avec les besoins ressentis dans ce moment-là.
Témoignage de B, 9 ans
Le père de B est inquiet que sa fille soit addict au sucre. Il a un frère en surpoids avec un syndrome métabolique. A la maison, c'est la guerre contre le sucre.
B revient me voir pour la 3e fois. Elle veut me raconter plein de choses. Elle va vers le paper-board, prend le marqueur et commence à dessiner.
"Tu vois, hier matin, je voulais manger 3 tartines avec du Nutella".
Elle dessine les 3 tartines et le pot de Nutella.
"Et bien j'ai savouré la première, elle était bonne. La deuxième, elle était bonne. Mais après j'en n'avais plus envie. Et je n'ai pas mangé la 3e."
Elle barre la dernière tartine.
Elle me parle du même processus pour d'autres repas, avec son jus d'orange, ses poires ou ses pâtes.
B est actrice de son comportement alimentaire, et prend confiance en ses ressources de régulation.
Une invitation à lâcher le connu qui demande du courage.
Il faut du courage pour oser sortir de nos habitudes, des diktats.
Les enfants ont moins de pensées limitantes, retrouvent plus facilement le chemin vers leur intuition.
Oser faire de nouvelles expériences pour venir définir nos propres lois, à partir de notre vécu, agréable, désagréable ou neutre. Tester, se faire confiance, ajuster, sans ego, guidé par l'intention de se faire du bien et de prendre soin de sa santé, de ses valeurs.
Cela peut faire peur et c'est normal.
Le travail psychocorporel avec une pratique telle que le yoga (ou autre) est central : trouver la sécurité en soi.
Alors, pas à pas, de jour en jour, le mangeur devient plus libre et avance vers son état de santé optimal.
Il gagne en confiance, se sent acteur et expérimente le cercle vertueux de son engagement.
C'est un des pouvoirs du moment présent au service de notre assiette.
Stop aux diktats, oui à l'empowerment
Nous avons materné les mangeurs, leur donnant à croire qu'ils n'étaient pas capable de faire des choix éclairés.
Nous avons donné le pouvoir à des Comme j'aime, Weight Watchers et Cie.
Il est temps de reprendre le pouvoir. De comprendre qu'en nous résident des ressources de force et de régulation qui nous guident vers l'action alimentaire juste pour nous.
Et cela commence par un pas.
Le pouvoir du moment présent nous invite à remettre en jeu la validité de chaque chose, car celle-ci est inscrite dans le passé, mais quelle est sa valeur dans l'instant? Mon petit-déjeuner, mon dessert, mes repas composés de façon automatique....Que deviennent-ils lorsque nous les passons à la moulinette de l'instant présent?
Le pouvoir est en nous. Voyons comment nous pouvons nous l'approprier avec bienveillance, douceur, sans en faire une nouvelle injonction, un nouvel outil de contrôle.
Qu'en pensez-vous?
Merci de votre attention et à lundi prochain!
Alexandra
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Photo @unsplash, @Birgith Roosipuu